DCQ conteste la nomination de Robert Leckey comme juge de la Cour supérieure du Québec
Sherbrooke, le dimanche 14 septembre 2025 - Droits collectifs Québec (DCQ) a introduit, le 9 septembre 2025, une demande introductive d’instance en jugement déclaratoire visant à déclarer illégale et inconstitutionnelle la nomination de l’honorable Robert Leckey à titre de juge de la Cour supérieure du Québec. En effet, selon l’organisme, M. Leckey ne satisfait pas les critères exigés par les différentes lois encadrant l’accès à la magistrature, et plus particulièrement à la fonction de juge de la Cour supérieure du Québec puisqu’au moment de sa nomination, le 27 janvier 2025, il n’avait été inscrit au Barreau du Québec depuis moins de dix ans. Aux yeux des dirigeants de l’organisme, une telle situation fait défaut de reconnaître la distinction juridique du Québec au sein du cadre fédératif ne peut qu’affecter la confiance du public québécois envers les tribunaux.
Une ancienneté au Barreau curieusement omise lors de l’annonce de sa nomination
C’est le communiqué de presse émis par le ministre de la Justice et Procureur général du Canada le 27 janvier 2025 annonçant la nomination de plusieurs juges qui a mis la puce à l’oreille de l’organisme; alors qu’on y indiquait clairement les années d'inscription au Barreau du Québec de tous les nouveaux juges nommés au Québec, aucune date concrète n’y figurait concernant l’honorable Robert Leckey. On y mentionne simplement que celui-ci « a été (…) membre du Barreau de l’Ontario et du Barreau du Québec », mais sans autre précision.
Or, suite à une demande d’information auprès du Barreau du Québec, DCQ a appris que l’honorable Robert Leckey n’a été dûment inscrit au Tableau de l’Ordre que du 20 décembre 2017 au 27 janvier 2025; ce qui équivaut à une période de 7 ans, 1 mois et 7 jours au moment de sa nomination. Il n’a par ailleurs occupé aucune fonction de nature judiciaire en vertu d’une autre loi canadienne ou québécoise avant son élévation au rang de juge à la Cour supérieure, ce qui lui aurait permis de satisfaire les critères d’admissibilité à la magistrature québécoise.
Une nomination à caractère illégal
Selon l’article 3 a) de la Loi sur les juges, une personne est admissible à la magistrature supérieure de nomination fédérale si elle cumule au moins 10 ans d’inscription au sein du barreau d’une province. Or, selon DCQ, cette exigence doit nécessairement être lue conjointement avec l’article 98 de la Loi constitutionnelle de 1867, de nature constitutionnelle, hiérarchiquement supérieur à la Loi sur les juges et qui doit nécessairement en guider l’interprétation. Cet article pose clairement que « [l]es juges des cours du Québec sont choisis au sein du barreau de cette province » et se lie historiquement au devoir constitutionnel de reconnaissance et de protection de la tradition civiliste du Québec civiliste au sein d’un Canada où partout ailleurs s’applique la common law.
Selon DCQ, cette disposition oblige à ne considérer que les années d’inscription au Barreau du Québec, d'où le caractère illégal et inconstitutionnel de la nomination du juge Leckey. Autrement, un candidat pourrait cumuler 20 ans d’expérience juridique dans une province anglo-canadienne, ne jamais avoir touché un Code civil du Québec ou pratiqué le droit au Québec - mais n’avoir qu’à s’inscrire une semaine, voire un jour seulement, au Barreau du Québec pour être ensuite nommé juge au Québec. Or, c’est précisément ce que le cadre constitutionnel de 1867 cherche à éviter en matière de nomination des juges. Cette situation n’est pas sans rappeler « l’affaire Marc Nadon », du nom d’un juge de la Cour fédérale nommé à la Cour suprême du Canada par le gouvernement Harper à titre de juge provenant du Québec, une nomination qui fut finalement jugée illégale le 21 mars 2014 par le plus haut tribunal canadien dans le Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, art. 5 et 6.
« Lors de sa dernière conférence de presse annuelle, le juge en chef de la Cour suprême du Canada, Richard Wagner, affirmait que le Canada est une démocratie dans laquelle « la primauté du droit n’est pas négociable ». Avec la nomination illégale d’un juge à la Cour supérieure du Québec par le gouvernement du Canada, ce dernier ne fait guère preuve d’exemplarité, et DCQ compte prendre tous les moyens afin de défendre le droits collectif des Québécoises et Québécois au respect de leur tradition de droit civil » de conclure Daniel Turp et Etienne-Alexis Boucher, respectivement président et directeur général de Droits collectifs Québec.